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« Ex Anima » : les sublimes adieux de Bartabas

Les chevaux semblent entre eux, les cavaliers absents.
Les chevaux semblent entre eux, les cavaliers absents. © Marion Tubiana


Avec cet ultime spectacle en son théâtre d'Aubervilliers, Bartabas, créateur du 

Théâtre équestre Zingaro, montre les chevaux en liberté. Une ode au souffle - 
de l'animal, comme de l'humain. Superbe.

Il faut savoir tirer sa révérence. Depuis trente ans, Bartabas cavale après l'art équestre 
en inventant des spectacles singuliers où l'homme et l'animal dialoguent. Pourtant, 
sans crier gare, il a décidé de faire d'« Ex Anima » son ultime salut. L'homme aux 
humeurs changeantes parle d'achèvement. Alors il a débarrassé la piste du 
superflu. Les chevaux semblent entre eux, les cavaliers absents. Dans 
leur costume sombre, on remarque à peine les interprètes, qui pourtant 
s'affairent dans l'ombre. Ils ne sont là que pour guider une monture vers
 la sortie ou lui donner une caresse lorsqu'elle bute sur un exercice. Bartabas,
 grand voyageur, a pensé au bunraku, le théâtre de marionnettes japonais,
 et à ses « invisibles » assistants.
« Ex Anima » s'avère une apothéose 
riche de toutes les expériences passées
 de Zingaro. Mais ce n'est plus la 
virtuosité du couple cheval-cavalier 
qui est à l'oeuvre. Comme surpris 
dans une intimité troublante, les 
équidés réunis offrent au regard leur
 simple majesté : une crinière brossée, 
des jeux partagés ou un solo amusé
 comme celui de Van Gogh, le bien nommé cheval à une seule oreille. Les effets 
de lumière magnifient encore les courses ou les rondes. Et lorsqu'un percheron 
s'élève dans les airs, on se prend à rêver du paradis des bêtes.

Laisser la parole aux chevaux

Bartabas réussit ce petit miracle : tenir son public en haleine par la seule grâce 
d'une cavalcade. Les amateurs de cirque peuvent passer leur chemin. Tout ici 
paraît hors du temps des hommes. Jusqu'à la musique, un magnifique travail 
autour de la flûte, qu'elle soit chinoise, japonaise, indienne ou irlandaise. Dans 
les brumes artificielles du théâtre, les chevaux se couchent. Le temps d'un pas
 de deux savoureux entre une mule et un âne, Zingaro vibre comme jamais.
Bartabas évoque l'impondérable à propos de cet opus : l'animal refera ce qu'il 
a appris. Ou pas. Sans garde-fou, le cheval, tout entier a sa liberté en scène, 
peut choisir de dévier sa course. Joli paradoxe. Ce soir de première, le 17 
octobre, il en fut ainsi plus d'une fois. Bartabas veut laisser la « parole » aux 
chevaux. Au final, l'équipe viendra saluer sans effusions. Demain sera un 
autre jour : lever aux aurores pour s'occuper des vraies stars de Zingaro, 
exercices puis représentation. Le cheval comme un sacerdoce. En attendant, 
chapeau bas, Bartabas.

Ex Anima
Conception Bartabas
Fort d'Aubervilliers, jusqu'en février 2018 puis tournée en France, 01 48 39 18 03,
 www.zingaro.fr


En savoir plus sur https://www.lesechos.fr/week-
end/culture/spectacles/030739428238-ex-anima-les-sublimes-adieux-de-bartabas-2123241.php#kO7K4PBXcGRhZ0Ax.99

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